Francois Ponsard (1814 – 1867), poète, dramaturge

1st image: Soirée; 2e: par Lehmann (1840); 3e: par Neumann (avant la Legion d'Honneur, c.1853); 4e: Cremière (c.1860); 5e: caricature par Carjat (1857). (Alternatif: Gounod)

Ponsard house Mont Solomont, Vienne

En 1843, Charles Reynoud, jeune poète de Vienne, se présenta au directeur du Théâtre de l’Odéon à Paris en affirmant détenir une tragédie magistrale écrite par son meilleur ami. Ne disposant pas du manuscrit, il récita la pièce de mémoire. Fasciné par sa brillance, « du pur Racine », le directeur sourit lorsqu’il apprit que son auteur était un avocat de Vienne, une ville provinciale.

Pendant les répétitions, il plaisanta sur ce mystérieux avocat. Un soir, il demanda : "Ce pseudonyme de Ponsard, y tenez-vous toujours beaucoup?" Ce n’est que lorsque le discret Ponsard se présenta enfin qu’ils découvrirent son identité.
Ponsard avait écrit Lucrèce, inspiré par la renommée émergente de la tragédienne Rachel Félix81. La tragédie, évoquant la grandeur de Corneille, fut créée le 22 avril 1843 et reçut un accueil triomphal. Un public lassé des pièces moralistes de Victor Hugo (Les Burgraves avait échoué un mois plus tôt) salua l’œuvre avec enthousiasme. Même le roi Louis-Philippe invita Ponsard à dîner.

Ponsard noua des amitiés étroites avec Reynoud, les écrivains Augier53 et Janin, l’éditeur-journaliste Lévy, ainsi qu’avec Rachel. Le groupe, qui se réunissait fréquemment au Café Riche et voyageait ensemble, entretenait des relations romantiques entrecroisées avec Rachel.
Ponsard eut une liaison avec 'Rachellina' durant les étés 1845 et 1846 en Italie. Elle accepta de reprendre Lucrèce en 1848, avec un succès encore plus grand. En 1850 et 1851, elle interpréta Horace et Lydia, une comédie de Ponsard.
En 1852, Ponsard collabora avec Gounod70b sur la tragédie Ulysse, pour laquelle Gounod composa des chœurs. La somptueuse production, à laquelle assistèrent Louis-Napoléon et des figures influentes telles que Baroche61, Fortoul46, et Magnan67, impressionna le public malgré des faiblesses littéraires.
Après cela, Ponsard se retira à Spa avec ses amis, où il s’adonna à son jeu favori, le trente-et-un.

Chalet Marie de Solms, Aix-les-Bains

Encouragé par la comtesse Marie d’Agoult, qu’il fréquenta en 1850, Ponsard s’orienta vers la comédie. Depuis le chalet de sa muse, la princesse Marie de Solms, amoureuse de poésie, à Aix-les-Bains, il acheva L’Honneur et l’Argent. Créée le 16 mars 1853, la pièce fut un triomphe, jouée 95 fois consécutivement. Le public appréciait ses allusions et épigrammes, ainsi que son plaidoyer pour l’honnêteté et la justice, défendant le droit contre le pouvoir et la conscience contre l’argent.

Une date plausible pour la présence de Ponsard à une vendredi-soirée est le 15 avril 1853 —juste après la création de L’Honneur et l’Argent et la remise du titre d’Officier de la Légion d’Honneur.
Il aurait pu rejoindre son ami Augier, qui remportait alors un succès avec Philibert, ou être accompagné de Rachel. Il n’existe aucune caricature par Giraud11. Cette soirée fut la dernière de l’année, suspendue ensuite en raison de la maladie de la mère de de Nieuwerkerke. Compte tenu de l’absence de preuves de la présence de Ponsard et de la faible concordance faciale, l’alternative est son ami Charles Gounod70b.

Ce printemps-là, Ponsard séjourna à Spa avec Rachel, entretenant ses amitiés masculines malgré leur passé amoureuse partagé avec elle. Cependant, il dilapida la majeure partie des 75 000 francs gagnés avec sa pièce au jeu. Durant l’été, son ami Charles Reynoud mourut alors qu’il se trouvait à Aix avec la princesse de Solms.
En octobre 1853, Rachel partit en tournée en Russie, en partie financée par le ministre Fould17 pour satisfaire Napoléon III, qui cherchait à s’éloigner de son ancienne maîtresse. La situation complexe de Rachel avec l’empereur et d’autres aurait incité de Nieuwerkerke à exiger une refonte du Une Soirée au Louvre en 1854, supprimant son portrait.

Ponsard canalisa son chagrin dans La Bourse (1856), qui surpassa le succès de L’Honneur et l’Argent.
Travaillant depuis Aix avec sa princesse de Solms (membre de la famille Bonaparte), sa liaison avec Rachel se détériora. Leur dernière rencontre eut lieu à Vienne après le retour de Rachel d’Égypte en 1857. Elle mourut en janvier 1858.

Le célibataire perpétuel et séducteur Ponsard écrivit trois nouvelles pièces, au succès modéré, et épousa Marie Pauline Dormoy (de 25 ans sa cadette) en 1863 et s'installa dans sa ville natale, Vienne. À cette époque, sa santé s’altérait également. Ignoré par lui-même, mais connu de sa femme et ses amis, un cancer de l’estomac le consumait lentement. Les traitements prolongés à l’arsenic, plus nocifs qu’efficaces, lui causèrent trois années de souffrances.
Nourri au chalet de Janin à Passy pendant ses derniers mois, Ponsard s’éteignit en 1867.
Après sa mort, un monument en bronze lui fut consacré à Vienne en 1870, mais il fut saisi et fondu par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. Il fut remplacé par une statue de pierre en 1950.